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Ataxie tardive (Late Onset Cerebellar Ataxia) : caractérisation clinique génétique (2007) [Recherche financée par l’ACAF]

Transcription de l’intervention d’Isabelle Thiffault à l’assemblée générale de l’ACAF du 4 novembre 2007

Présentation à consulter

Bonjour, je suis Isabelle Thiffault, chercheure en formation au doctorat depuis près de trois ans et demi sous la supervision du Dr Bernard Brais. Les premières années de mon doctorat, j’ai été boursière de l’ACAF. Maintenant, j’ai une bourse du gouvernement, mais on reçoit aussi l’argent de votre Fondation ce qui nous aide à démarrer de nouveaux projets.

Malheureusement, le Dr Brais ne sera pas là aujourd’hui. Il est à l’urgence. C’est l’histoire des médecins d’aujourd’hui avec le manque de neurologues. Je vais essayer de représenter Dr Brais du mieux que je peux. Miriam Srour travaille aussi avec moi, c’est une nouvelle neurologue spécialisée en pédiatrie, elle est en formation à notre laboratoire. Elle a travaillé beaucoup avec moi sur le projet que je vais présenter ici au niveau de la description clinique. Elle a travaillé aussi sur d’autres formes de maladies, pas nécessairement ataxiques, mais musculaires. Elle aurait aimé venir ici aujourd’hui avec moi, mais malheureusement elle est également retenue à l’urgence avec Dr Brais.

Comme on vous a dit l’année passée on étudiait une forme d’ataxie qui s’appelle l’ataxie de Beauce. À travers cette cohorte-là, on a déjà commencé le recrutement de nouvelles personnes qui ont des formes d’ataxies dont on ne connaissait pas la cause. Cela nous a amené à former une nouvelle cohorte dès 2005, celle qu’on appelle maintenant : ataxie tardive. Évidemment, d’après le nom vous pouvez comprendre que c’est une ataxie qui se développe très tard. La majorité de nos patients développent cette ataxie vers l’âge de 60 ans et ce contrairement aux ataxies que vous connaissez très bien, comme l’ataxie de Friedreich, l’ataxie de Charlevoix-Saguenay qui est une forme un peu plus sévère, beaucoup plus sévère dans certains cas et qui commence chez l’enfant. En anglais, on l’appelle Late Onset Cerebellar Ataxia (LOCA). Ça veut dire que c’est surtout une dégénérescence au niveau de la partie arrière du cerveau qu’on nomme le cervelet. Plus loin, je vais utiliser le terme LOCA.

Sur la figure que je vous présente vous pouvez voir que dans le laboratoire de neurogénétique on a énormément de projets. Beaucoup trop de projets pour le nombre de personnes qu’on est. Nous travaillons aussi sur les dystrophies musculaires, les myotonies congénitales, les ataxies dans la région de la Gaspésie (on en a deux en fait : l’ataxie AOA2 et une polynévrite qui est aussi une forme d’ataxie, l’ataxie récessive avec leucoencéphalopathie qui est mon premier projet, ce qu’on appelait avant l’ataxie de Portneuf), la névrite sensitive dans la région de Lanaudière, la dystrophie des ceintures, la dystrophie congénitale dans la région de Montréal, l’ataxie de Beauce, et maintenant on peut rajouter l’ataxie tardive que je vous présente aujourd’hui. Ce qui est important de remarquer, c’est que même dans de petites régions comme le Saguenay-Lac-Saint-Jean avec une forme d’ataxie héréditaire, il y a souvent beaucoup de mutations. Seulement, au Saguenay-Lac-Saint-Jean, avec la myotonie congénitale il y a cinq mutations. Vous comprenez maintenant la complexité. Plus on découvre de nouvelles maladies, plus on se rend compte que non seulement ce n’est pas parce qu’elles sont plus rares qu’on les découvre maintenant, mais parce qu’il y a plus de mutations, plus d’hétérogénéité dans la population. Je vais y revenir. Au niveau des hypothèses de recherche, comme la plupart des mutations qu’on retrouve au Québec, on parle d’effet fondateur. On pense, comme dans le projet que je vous présente aujourd’hui, qu’il y en a au moins une, et plus probablement trois ou quatre mutations qui ont été implantées au sein de la population du Québec. Les mutations sont peut-être arrivées au moment de la formation du Québec, mais c’est possible aussi que les mutations aient été amenées de la France ou de l’Angleterre, dépendamment des origines des patients qu’on a. Au niveau du pedigree, ce qu’on regarde c’est la forme de transmission, on parle d’un mode de transmission héréditaire autosomique récessif, comme la plupart des ataxies que vous connaissez. Cela veut dire que les deux parents doivent être porteurs de deux mutations dans le gène, et la personne atteinte doit avoir reçu deux copies. Donc, une copie de la mutation dans le gène provenant du père et de la mère pour avoir la maladie.

Au niveau de la variabilité phénotypique, ce qui rend la complexité des ataxies qu’on découvre aujourd’hui, c’est que c’est très variable. Même au sein d’une famille avec trois atteints, c’est-à-dire avec des soeurs et des frères atteints, on voit une énorme différence au niveau du phénotype. Il y en a chez qui la maladie commence tôt et dont la progression de la maladie est très lente, plutôt stable. Il y en a chez qui la maladie commence plus tard, mais dont la progression est très sévère. Lorsqu’on parle d’une mutation fondatrice, je vous ai mis ici un petit graphique pour mieux expliquer ce que c’est. Comme je vous ai dit, la mutation peut provenir d’Europe ou s’être produite ici au Québec. Il y a une mutation qui se produit dans une cellule qu’on appelle germinale. Plus souvent, les mutations vont arriver dans nos cellules sexuelles, donc au niveau des spermatozoïdes, au niveau de l’ovule. C’est l’enfant qui va avoir reçu cette mutation-là. Si la mutation arrive durant cet événement-là, l’enfant n’aura pas de maladie. Si la mutation ne cause pas la mort du foetus cette personne-là sera porteuse de la mutation. Puis lorsqu’elle aura des enfants, elle pourra transmettre ces mutations à ses enfants. C’est pour cela qu’on voit un processus d’hérédité. Puis au moment où la personne développe la maladie parce que il y a eu deux personnes porteuses, qui n’avaient pas la maladie et qui ont eu un enfant qui a reçu les deux allèles avec la mutation. On voit que cela arrive au niveau des parents : en génétique il y a souvent des recombinaisons, des mutations. C’est transmis aux enfants, puis les enfants ont des enfants et ça va dans la population. Ici vous voyez sur le graphique les deux parents en bleu, ils n’ont pas la maladie. « M » c’est le même gène avec une mutation. Les deux parents sont porteurs. Ici, l’enfant a reçu les deux chromosomes avec l’allèle mutant, donc il est malade (c’est en rouge). Au niveau des séquences d’ADN – nous pouvons les lire maintenant – par rapport au contrôle où c’est bleu, les parents ont un allèle bleu et un allèle rouge, puis au niveau de l’enfant, c’est l’allèle rouge seulement. C’est juste pour vous montrer ce que nous regardons au niveau de la génétique. Au niveau des objectifs pour notre projet de recherche, le premier c’était de terminer le recrutement des patients. Le recrutement des patients se fait vraiment sur des années. Les premiers cas ont été recrutés en 2004–2005, et on a terminé le recrutement seulement en 2007. Évidemment, ce qui est aussi important c’est la description clinique de la maladie. Vous vous en rendez compte qu’il y a de plus en plus de formes d’ataxies. Nous devons dire aux médecins quels sont les signes différents de cette forme d’ataxie, par rapport aux autres formes, pour que les médecins du Québec et d’ailleurs soient capables de la diagnostiquer. Ensuite, il faut en premier lieu toujours exclure les formes d’ataxies connues.

Au niveau du matériel et des méthodes, comme je vous ai dit le recrutement a débuté en 2005. On avait l’idée que c’était une forme héréditaire. Chez la première famille qu’on a vue, trois personnes étaient atteintes. Lorsqu’on a commencé à questionner les enfants, les cousins, les oncles, les tantes, on a réalisé que les deux parents étaient originaires d’un même petit village au Québec. Mais ils n’avaient pas de lien de consanguinité, ils n’étaient pas des cousins germains. C’était possiblement, une forme héréditaire et récessive. Par le fait même, on est allé au Saguenay et on a commencé à recruter des familles qui avaient des formes très similaires. Le Saguenay-Lac-Saint-Jean est connu pour les effets fondateurs génétiques. Ce n’est pas qu’il y ait plus de maladies génétiques au Saguenay, mais à cause de la formation du Saguenay, il y a plus d’homogénéité. C’est plus concentré, puisque les gens qui viennent du Saguenay restent souvent au Saguenay, il n’y a pas beaucoup d’échange avec l’extérieur du Québec. Maintenant, on connait le Saguenay plus qu’ailleurs, c’est souvent des formes infantiles dont on entend beaucoup parler. Puis, on fait beaucoup plus de recherches sur les formes infantiles.

Voici une carte du Québec. C’est pour vous montrer la distribution géographique de l’origine des patients que nous avons recrutés jusqu’à aujourd’hui. Il est important de remarquer les deux cercles blancs que nous avons dessinés. En fait, on a énormément de familles qui viennent du Saguenay-Lac-Saint-Jean, beaucoup de familles des Cantons-de-l’Est (en anglais Eastern Township). Dans les régions comme les Cantons-de-l’Est ce n’est pas seulement ce qu’on appelle les Canadiensfrançais, il y a aussi beaucoup de familles avec des noms anglophones. Il y a un mélange génétique qui est beaucoup plus important et qui rend nos analyses génétiques beaucoup plus compliquées.

Ici, le schéma montre qu’il y a au-dessus de 35 familles maintenant; et on a l’ADN de 183 personnes. On a prélevé les patients partout au Québec pour essayer d’avoir le maximum d’information génétique.

Travailler sur les maladies tardives est plus compliqué. La plupart des patients ont leur diagnostic à 60 ans, et souvent leurs parents sont déjà décédés, les frères, soeurs et cousins probablement aussi. C’est donc difficile d’avoir le maximum de personnes pour l’étude. Plus on a de personnes dans la même famille, plus on a le pouvoir de trouver le gène et les mutations. Donc travailler avec des formes tardives est beaucoup plus compliqué. Mais vous voyez qu’on a fait quand même un bon travail, on a énormément de patients et de familles en deux ans.

Ici on a une table qui montre aux patients et aux médecins les caractéristiques de cette forme d’ataxie. L’âge moyen du développement de la maladie est 60 ans, mais il y a des patients qui ont développé la maladie à la mi-cinquantaine (les plus jeunes 52–53 ans). Mais il y en a qui ont été diagnostiqués à 88 ans. Souvent, la maladie peut se développer, mais ça prend des années avant que le patient ne voit un neurologue, qui va vraiment faire un diagnostic. Si vous regardez l’âge du premier examen neurologique, c’est 88 ans. Il y a 15 ou 20 ans entre les premiers symptômes et le diagnostic. 48 % de nos patients ont besoin d’une canne ou d’un déambulateur. 29 % sont en chaise roulante. C’est donc une forme beaucoup moins sévère que d’autres formes que vous connaissez, comme l’ataxie de Friedreich, l’ataxie de Charlevoix- Saguenay, où même les enfants sont en chaises roulantes.

Au niveau des autres symptômes, on a deux régions au Québec où il y a le plus grand nombre de familles : le Saguenay-Lac-Saint-Jean et les Cantons-de-l’Est. Il y a autant d’hommes que de femmes atteintes. Ça s’appelle autosomique, cela veut dire que c’est pas sur des chromosomes sexuels, chromosomes X et Y. C’est une forme récessive, ce qui veut dire que les parents ne sont pas atteints. Les principales caractéristiques cliniques sont la présence de l’ataxie dans tous les cas; la dysarthrie dans 81 % des cas. Lorsqu’on fait l’imagerie du cerveau, on voit dans 88 % des cas une atrophie du cervelet et 50 % des cas ont aussi une atrophie cérébrale au niveau frontale chez nos patients. 52 % des patients ont un nystagmus, un phénotype oculaire. Mais on ne peut pas être certain que c’est typique à la maladie ou que c’est seulement dû au processus de vieillissement chez les patients au-dessus de 60 ans. 29 % des cas sont en chaise roulante.

Au niveau de l’exclusion des autres formes d’ataxies, on commence toujours par les ataxies connues. Évidemment, on a testé l’ataxie de Friedreich, les ataxies spino-cérébelleuses de type 2 et de type 6. Nous avons fait aussi les analyses pour le syndrome du X-fragile, et nous avons fait les deux autres formes d’ataxies dont on vous a parlé, celle de l’année dernière, l’ataxie de Beauce. On a fait des études d’haplotypes et de mutations. Je crois que l’année dernière, on vous a présenté deux mutations. Aujourd’hui, en 2007, on est rendu à sept mutations dans l’ataxie de Beauce seulement pour la région du Québec. Et mon autre projet principal c’est l’ataxie de Portneuf (ARSAL). J’ai aussi exclu ces deux locus-là pour tous les patients. Donc, toutes les familles sont évidemment négatives pour ces formes d’ataxies. On a dénoté aucune mutation, aucune homozygotie ou de partage d’allèle dans ces régions. Ce qui est en fait une nouvelle forme d’ataxie.

La deuxième étape est d’essayer de trouver où dans le génome se situe le gène responsable de cette maladie-là. On utilise des marqueurs microsatellites et on fait affaire avec une compagnie islandaise. On teste 388 marqueurs partout dans le génome. Ce sont des études assez dispendieuses : par patient ça coûte environ 200 $ pour faire cette première étape-là. Ensuite, il faut faire une cartographie fine : quand on a trouvé la région sur le chromosome, il faut trouver le gène de cette région qui cause la maladie. Il faut analyser par séquençage, comme les petits pics de couleur que je vous ai montré, tous les gènes de la région.

Pour faire ces études génétiques, il faut que les familles soient assez grandes. Je vous ai dit qu’on a 35 familles qui ont au moins un cas atteint de LOCA. On a recruté tout le monde, au total 188 ADN, mais ce n’est pas toutes les familles qui ont suffisamment d’individus pour faire des analyses génétiques. On a fait quand même des études, mais on a pris seulement les plus grandes familles qui ont le plus de membres atteints et non atteints pour faire la première étape de la recherche. Comme je vous ai dit, on utilise des marqueurs microsatellites, de petites répétitions dans le génome, appelées « CA ». On les teste partout pour essayer de voir les différences entre la personne atteinte et non atteinte. Alors on doit analyser 388 marqueurs. Maintenant, il y a un logiciel qui nous permet de calculer quelle région est responsable de cette maladie. Ce sont les valeurs de liaison appelées « lod ». (Je n’ai pas assez de connaissances en informatique pour expliquer tout le fonctionnement de ce logiciel en profondeur.) C’est de cette façon-là qu’on va trouver la région dans le chromosome.

Vous voyez ici le graphique fait par ce logiciel. Plus c’est haut, plus c’est positif. Le gène se situe entre les marqueurs. C’est comme ça qu’on arrive à savoir où dans le génome est située la maladie. Ensuite, on compare les chromosomes de toutes les familles. Je fais toujours des codes de couleur. Vous pouvez voir qu’il y a beaucoup de chromosomes verts – c’est notre chromosome de Saguenay. Le chromosome orangé c’est les anglophones des Cantons-de-l’Est. Vous pouvez voir qu’il y a des patients qui ont les deux chromosomes. Cela veut dire qu’ils ont des parents provenant du Saguenay et des Cantons-de-l’Est qui étaient porteurs de la maladie.

Ici, vous voyez des molécules d’ADN et des répétitions CA dont je vous ai parlé. Voici un gène, un petit bout de l’ADN. C’est la molécule d’ADN. Elle forme les chromosomes qui sont dans le noyau de nos cellules dans tout notre corps. Donc, lorsqu’on parle d’une maladie génétique héréditaire, ce n’est pas seulement dans le cerveau, qu’il y a des mutations dans les noyaux, mais toutes les cellules de notre corps sont porteuses de cet allèle malade. Toutefois, il y a certaines régions, certains tissus, certains organes, où la maladie se développe.

Le locus de LOCA se trouve dans le chromosome 13. Juste pour vous rappeler, dans le génome humain, donc dans tous les noyaux des cellules ici, il y a 23 paires de chromosomes, donc 46 chromosomes au total. On a nos deux chromosomes 13, ici ça va de chromosome 1 à 22 plus les chromosomes sexuels. La maladie que je vous présente est sur le chromosome 13.

Maintenant, quand on sait marquer la région en haut, regardez le pic très élevé, je pouvais savoir entre quel et quel marqueur se trouve la maladie. Ça me permet d’aller voir une carte (il y a beaucoup de bases de données sur Internet) pour savoir quels gènes qui se trouvent dans cette région-là pourraient causer la maladie. Cet intervalle-là est d’environ 4 centimorgan (cM). C’est quand même une très grande région; il y a 25 gènes. Donc, on avait 25 gènes à analyser. C’est beaucoup de travail. Ça coûte cher – chaque gène nous coûte des milliers de dollars à séquencer. Nous avons donc décidé d’utiliser une nouvelle technologie similaire à celle dont je vous ai parlé tantôt, avec les répétitions, mais avec un petit changement. C’est pas une répétition CA; c’est juste une lettre, par exemple T, changée pour une autre. Donc on peut les tester avec une technologie appelée micro puces d’ADN. La micro puce d’ADN est une petite plaque de verre. Si on agrandit une plaque, on peut voir beaucoup de petites bulles, et sur les bulles il y a beaucoup d’ADN synthétiques. Nous collons l’ADN des patients sur ces plaques-là, et ça nous donne des résultats qui sont analysés par une machine. Ensuite nous analysons chaque personne, avec des lasers; c’est vraiment de la haute technologie. On essaie de voir si on pourrait se rapprocher du gène qui cause la maladie. Cette technologie nous a permis de confirmer que la maladie qu’on décrit est sur le chromosome 13. On a réussi à le confirmer, ainsi que de réduire l’intervalle. Tantôt, je vous ai dit que la première technologie avec la compagnie deCODE nous donnait 388 marqueurs. Avec cette technologie-là on teste plus de 350 000 marqueurs. Donc, vous comprenez que maintenant avec l’informatique nous avons besoin de personnes très compétentes, parce qu’on a énormément de résultats à analyser. C’est 350 000 marqueurs pour tous les patients qu’on analyse. Ce sont des données préliminaires, donc je n’ai pas encore terminé d’analyser les résultats. C’est qu’au lieu de la région de 4 centimorgan (ce qu’on a vu tantôt) qui a 25 gènes, on a une petite région de 0,5. Imaginez 4 cm à 0,5 cm, c’est une énorme différence. Je confirme les résultats dans les prochaines semaines. Cela veut dire qu’au lieu de séquencer 25 gènes, il en reste 2 ou 3 à analyser. Mais avant, on n’avait pas accès à cette technologie-là. Elle existe depuis quelques années à Montréal, à l’Université McGill au Centre du génome, mais on y avait pas accès, parce que c’était très cher. Avant, ça coûtait mille dollars par personne pour tester. On n’avait pas de moyens pour l’utiliser. Mais maintenant, on a diminué les coûts et depuis un an c’est 200–250 $, et on peut se permettre de l’utiliser pour trouver les causes des maladies génétiques.

En conclusion, il y a deux effets fondateurs de l’ataxie tardive (LOCA) : l’un est au Saguenay, l’autre dans les Cantons-de-l’Est. À l’aide des différents centres, des cliniques et de tous nos collaborateurs (Dr Bernard Brais a des collaborateurs partout au Québec, d’autres neurologues) nous avons recruté 35 familles, dont 188 ADN. C’est la plus grande cohorte d’ataxie tardive jamais recrutée au monde. La semaine dernière, j’ai présenté les mêmes résultats en Californie. On a eu un beau rapport avec les chercheurs des États-Unis et de l’Europe. Il y avait même des gens du Japon. Ils étaient intéressés par ce projet-là, parce que c’est vraiment pour la première fois qu’on démontre qu’une maladie bien que tardive peut être génétique et héréditaire et que c’est pas seulement un processus de vieillissement. On est très fier de ce projetlà. Et c’est grâce à votre support qu’on est capable de faire les recherches qu’on fait. C’est important de le souligner.

Le phénotype, comme j’ai déjà dit, et la sévérité sont très variables. C’est ce qu’on voit à travers les familles. Donc, la cartographie fine se poursuit, je n’ai pas terminé les analyses, mais on a réussi à confirmer que c’est sur le chromosome 13. Puis, grâce aux micro puces d’ADN on a trouvé que c’était une petite région. L’année prochaine je pourrai probablement vous présenter les mutations et le gène.

Au niveau des analyses des haplotypes, on a deux chromosomes, orange et vert. Puis, ça explique environ 77 % des cas. Comme, par exemple, dans plusieurs formes d’ataxie, la première image que je vous ai montré avec les régions, avec tous nos projets, c’est que l’on va avoir au moins 3–4 mutations dans le gène qui cause la maladie.

Au niveau des analyses par séquençage, on n’a pas commencé encore, parce qu’on attendait les derniers résultats. Au lieu d’analyser 25 gènes, on va avoir seulement 2 ou 3 à analyser.

À cause de la sévérité de la maladie on peut quand même penser à une répétition de triplets. Je pense que vous êtes au courant, comme dans l’ataxie de Friedreich que c’est la région GAA qui est répétée d’une façon exponentielle. On peut quand même penser, j’en ai pas vu jusqu’à présent, mais on continue les analyses, que ça peut être un peu le même genre de mutation dans ce cas-là.

Il est important de rappeler aussi que c’est la première fois qu’on a identifié un locus pour une forme d’ataxie tardive. Et non seulement c’est une ataxie tardive, mais il y a certains cas qui progressent vers MSA. Dr. Brais pourrait mieux vous expliquer ce que c’est. Je vais essayer de vulgariser. C’est une atrophie multiple des systèmes, qu’on appelle plus souvent qu’autrement le Parkinson. On a beaucoup de patients ataxiques qui vers l’âge de 80 ans ont ce qui ressemble beaucoup plus au Parkinson qu’à l’ataxie. C’est intéressant, parce que le Parkinson c’est lié au processus de vieillissement mais il peut y avoir beaucoup plus de génétique qu’on pense. Et peut-être que l’ataxie serait le premier phénotype qu’on pourrait voir chez certains patients avant qu’ils aient le Parkinson. Ce qui veut dire qu’on pourrait employer les médicaments utilisés pour le Parkinson. Peut-être avant le développement du syndrome Parkinsonien chez ces patients, évidemment on n’est pas encore à ce niveau-là. Mais ce sont des hypothèses qui nous viennent. Les perspectives de notre projet à court terme : je vais terminer les analyses avec les micro puces d’ADN. Ensuite, je pourrai séquencer les gènes candidats de la région. Puis trouver les mutations responsables.

À long terme ce que nous allons faire, on a beaucoup de cas qui deviennent des MSA ou des parkinsoniens, si vous préférez. C’est quand on va voir le gène et les mutations, on va prendre toutes les cas qu’on a dans l’hôpital, dont on a de l’ADN, des cas parkinsoniens, on va tous les séquencer pour ce gène-là, et peut être on va trouver les raisons du Parkinson chez d’autres gens.
Une fois qu’on a trouvé les mutations et les causes, on peut offrir aux patients un test diagnostic. On va donner non seulement un test diagnostic, mais aussi un traitement. Pour faire le traitement il faut comprendre la protéine. Donc on va faire aussi des analyses au niveau de la protéine pour comprendre à quoi elle sert dans le cerveau et pourquoi ça cause l’ataxie, et pourquoi à un moment donné ça devient parkinsonien.

Puis, comme on a commencé aussi à faire avec d’autres projets comme l’ataxie de Charlevoix-Saguenay, on va probablement faire un modèle animal, comme un modèle de souris transgénique. Ça nous permet de tester des médicaments et mieux comprendre la maladie, quand on a des modèles animaux. Il y a aussi un modèle mouche qui sert à étudier une forme d’ataxie. On utilise les mouches, parce que des gènes importants, surtout des gènes du cerveau, on les voit même chez des organismes peu développés, comme la mouche. Cela nous permet de mieux comprendre la protéine et rapidement tester les molécules pour voir si on peut avoir un traitement.

Je remercie premièrement toutes les familles participantes à l’étude. Puis je remercie la Fondation Claude St-Jean, parce qu’on ne peut pas commencer de projets sans le support d’une Fondation comme la vôtre. Depuis plusieurs années, la Fondation est un grand support pour le Dr Brais et ces étudiants qui travaillent sur les ataxies ont reçu des bourses de votre organisme. Nous sommes très fier de présenter le logo de l’ACAF à chaque fois qu’on fait une présentation à l’étranger. J’espère que le rayonnement de votre Association va devenir de plus en plus grand. Merci.

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